Prud'hommes : comment saisir les prud'hommes

"Prud'hommes : comment saisir les prud'hommes"

Comment saisir les prud'hommes avec une procédure simple à suivre. Délai, formalités, recours : le mode d'emploi pour agir aux prud'hommes.

Que sont les prud'hommes ?

Le conseil de prud'hommes est une juridiction compétente pour résoudre les litiges liés au contrat de travail. A ce titre, il juge notamment toutes les demandes liées à la conclusion, à l'exécution et à la rupture de ce contrat. En pratique, le conseil de prud'hommes est donc la juridiction compétente pour les affaires opposant un salarié et son employeur. Il traite par exemple les litiges en lien avec un licenciement, le paiement du salaire, la durée de travail... Le mot "prud'homme", parfois aussi orthographié "prudhomme", vient de l'ancien français et désigne à l'origine une personne considérée comme experte et à même de conseiller dans un domaine.

La compétence et le fonctionnement du conseil de prud'hommes sont régis par les articles L. 1411-1 et suivants du Code du travail. La saisine du conseil est un droit reconnu par la loi aux salariés et aux employeurs. Une clause du contrat de travail qui prévoit une procédure de médiation préalable en cas de litige survenant à l'occasion de ce contrat n'empêche donc pas les parties de saisir directement les prud'hommes sans passer par cette phase (avis n° 22-70004 rendu par la chambre sociale de la Cour de Cassation le 14 juin 2022).

Le conseil de prud'hommes est une juridiction dite "paritaire". Il n'est pas composé de magistrats professionnels mais de salariés et employeurs élus dans le cadre des élections prud'homales. Le président du conseil de prud'hommes est alternativement un salarié ou un employeur. Si le président est un employeur, le vice-président doit être un salarié et réciproquement.

Faut-il un avocat aux prud'hommes ?

C'est une question que se pose tout salarié qui envisage d'agir en justice contre son employeur : un avocat est-il obligatoire aux prud'hommes ? La réponse est non. Un salarié peut donc se défendre seul aux prud'hommes. Toutefois, il est conseillé d'avoir recours à un avocat, surtout si votre litige est complexe et/ou si la partie adverse a elle-même recours à un avocat. Ces règles concernent la procédure en première instance. En appel, la réglementation impose une représentation par un avocat ou un défenseur syndical.

Les honoraires d'avocat représentent un coût. Si vous ne dépassez pas un certain niveau de revenus, vous pouvez demander l'aide juridictionnelle pour vous aider à financer vos frais. Si vous souhaitez vous défendre seul aux prud'hommes, vous pouvez toujours consulter préalablement un avocat spécialisé en droit du travail qui vous conseillera sur les arguments juridiques à avancer et vous indiquera les formalités à suivre au cours de la procédure

Quel conseil de prud'hommes choisir ?

Le conseil de prud'hommes est compétent pour juger les litiges entre un employeur et un salarié en lien avec un contrat de travail de droit privé (licenciement, paiement du salaire, sanction disciplinaire...). La juridiction compétente territorialement est celle du lieu où se trouve l'établissement dans lequel le salarié accomplit son travail. Il peut également être celui du siège social de l'entreprise. Si le salarié travaille à domicile ou en dehors de tout établissement, le conseil de prud'hommes du lieu de son domicile peut également être saisi. On compte au moins un conseil de prud'hommes dans le ressort de chaque tribunal judiciaire.

Attention : en cas de contrat de travail de droit public, ce n'est pas le conseil de prud'hommes mais le tribunal administratif qui est compétent.

Quel est le délai pour agir aux prud'hommes ?

Pour pouvoir saisir les prud'hommes, le délai pour agir ne doit pas avoir expiré. Le demandeur ne doit donc pas trop tarder, car les délais de prescription sont relativement courts. La durée pour agir est de :

  • 6 mois pour contester le montant porté sur le solde de tout compte.
  • 12 mois pour :
    • les actions liées à la rupture du contrat de travail ;
    • les désaccords portant sur une rupture conventionnelle homologuée ou sur la validité d'un licenciement économique.
  • 2 ans si le litige porte sur l'exécution du contrat de travail : sanction disciplinaire, mutation, clause de non-concurrence, clause de mobilité...
  • 3 ans si le conflit porte sur :
    • le paiement du salaire (non-paiement d'une prime ou d'heures supplémentaires, salaires impayés, etc.) ;
    • de l'indemnité de préavis ou de congés payés ;
    • de l'indemnité de départ à la retraite ;
    • de l'indemnité compensatrice de non-concurrence.
  • 5 ans si le litige est en lien avec un harcèlement harcèlement moral ou sexuel ou une discrimination.

Comment saisir les prud'hommes ?

Le conseil de prud'hommes est saisi par une requête adressée par voie postale (en recommandé ou par lettre simple) au greffe de la juridiction. Le courrier comprend un formulaire à remplir. Il comporte notamment :

  • les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance du demandeur ;
  • les nom, prénoms, et domicile de la personne contre laquelle la demande est formée ;
  • un exposé sommaire des motifs de la demande, les sommes réclamées et à quel titre ;
  • toutes les pièces justificatives nécessaires.

Le demandeur doit utiliser un formulaire Cerfa. Ce document peut être téléchargé en ligne sur internet : Télécharger le formulaire 15586 pour saisir les prud'hommes. Le demandeur doit joindre l'ensemble des pièces lui permettant d'appuyer sa demande. Il peut s'agir de courriers échangés avec son employeur, de témoignages de collègues, de copies de bulletins de paie ou du contrat de travail... La liste de ces pièces doit être indiquée dans un formulaire à joindre au dossier : télécharger le bordeaux de pièces à fournir aux prud'hommes.

La requête doit être présentée en plusieurs exemplaires : l'un est conservé par le greffe, les autres sont destinés au(x) défendeur(s), à mesure d'un exemplaire supplémentaire par défendeur. Elle doit donc être complétée et remise au moins en 2 exemplaires. Le greffe informe ensuite le demandeur des lieu, jour et heure de la séance au bureau de conciliation. Le défendeur est pour sa part convoqué à cette séance par lettre recommandée avec accusé de réception. Chaque partie est invitée à se munir de toutes les pièces utiles.

Qu'est-ce que l'audience de conciliation aux prud'hommes ?

Avant la procédure de jugement, une phase de conciliation a lieu auprès du bureau de conciliation et d'orientation (BCO). Cette étape vise à éviter autant que possible une procédure contentieuse entre l'employeur et le salarié.

En principe, cette phase de conciliation est obligatoire. Mais certaines affaires peuvent être portées directement devant le bureau de jugement sans passer par le bureau de conciliation. C'est le cas lorsque la demande porte sur la requalification d'un CDD en CDI ou la requalification d'un stage en contrat de travail. Il est en de même lorsque le litige porte sur une prise d'acte de rupture du contrat par le salarié.

La séance a en principe lieu à huis-clos. Les parties doivent comparaître personnellement mais peuvent être représentées. Elles peuvent également se faire assister pendant cette phase de la procédure. Chaque partie présente ses arguments dans le cadre d'une procédure orale. L'issue de celle-ci est constatée au sein d'un procès-verbal établi par le bureau.

Désormais, une indemnisation prud'homale forfaitaire, dont le montant est fixé à partir d'un barème, peut être définie par accord entre le salarié et l'employeur au cours de cette phase de conciliation.

Lorsque la tentative de conciliation se solde par un échec (ce qui, en pratique, arrive dans la très grande majorité des affaires), la phase de jugement a alors lieu. Entre-temps, le bureau de conciliation peut néanmoins ordonner certaines mesures provisoires (comme la délivrance de bulletins de paie par exemple).

Comment se déroule un procès aux prud'hommes ?

Le greffe convoque les parties à l'audience en leur adressant une lettre recommandée avec avis de réception. Les règles en matière d'assistance et de représentation sont les mêmes que devant le bureau de conciliation. Les débats ont lieu en audience publique.

La décision du bureau est prise à la majorité absolue des voix. En cas de partage des voix, une nouvelle audience a lieu sous la présidence d'un juge du tribunal judiciaire qui permet alors de départager les conseillers prud’homaux. Il est à noter qu'une conciliation, même partielle, entre les deux parties peut toujours avoir lieu devant le bureau de jugement. L'accord est alors constaté par l'établissement d'un procès-verbal.

Le jugement est notifié par le greffe du conseil de prud'hommes au lieu du domicile des parties par lettre recommandée avec avis de réception. Les parties peuvent également le faire signifier par acte d'huissier.

Quelle est la durée d'une procédure aux prud'hommes ?

Les délais d'une procédure aux prud'hommes dépendent des juridictions et varient selon leur degré d'engorgement. Dans l'ensemble, ils sont relativement longs. Il faut dans la plupart des cas patienter au moins une année avant d'obtenir un jugement aux prud'hommes, les délais de procédure étant particulièrement longs à Paris et en région parisienne.

Comment faire appel d'un jugement de prud'hommes ?

On peut faire appel d'in jugement des prud'hommes dans le délai d'un mois à compter de sa signification. L'affaire est alors portée devant la chambre sociale de la cour d'appel. Toutefois, l'appel du jugement des prud'hommes devant une cour d'appel n'est possible que lorsque le montant total des prétentions est supérieur à la somme de 5000 euros. En dessous de cette somme, le jugement du conseil ne peut être contesté que par le biais d'un pourvoi en cassation.

Ce plafond était fixé à 4000 euros avant le 1er septembre 2020. Le décret 2020-1066 du 17 août 2020 a ré-haussé ce montant pour le porter à 5000 euros.

Si le " perdant " estime que la décision du Conseil des Prud'hommes ou de la Cour d'appel a violé certaines règles de droit (excès de pouvoir, vice de procédure, etc.), il peut former un " pourvoi en cassation " dans les deux mois qui suivent la notification du jugement.

Quel est le délai d'exécution d'un jugement des prud'hommes ?

Une fois que le conseil de prud'hommes a statué, il est possible faire exécuter le jugement au plus tard le lendemain du délai d'épuisement des voies de recours. En principe, le délai pour faire appel est fixé à 1 mois.

Si la partie adverse n'exécute pas la décision de lui-même, vous devez vous adresser au greffe pour lui demander une copie exécutoire du jugement afin de le faire exécuter. Muni de ce titre exécutoire, il vous sera possible de contraindre votre débiteur à s'exécuter en vous adressant à un huissier de justice qui pourra procéder à une saisie.

Combien coûte une procédure aux prud'hommes ?

La saisine des prud'hommes est gratuite. Contrairement à il y a quelques années, aucun droit de timbre n'est demandé. En revanche, un salarié ou un employeur qui décide d'avoir recours à un avocat aux prud'hommes devra payer ses frais d'honoraires. Ce coût peut toutefois être pris en charge par l'aide juridictionnelle sous conditions de ressources.

Qui peut assister un salarié aux prud'hommes ?

Dans la très grande majorité des affaires aux prud'hommes, les salariés sont assistés d'un avocat ou d'un défenseur syndical. Il est donc rare qu'un salarié se défende seul. Peuvent représenter ou assister les parties :

  • les salariés ou les employeurs appartenant à la même branche d'activité ;
  • les délégués permanents ou non permanents des organisations d'employeurs et de salariés ;
  • le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin ;
  • les avocats.

L'employeur peut se faire assister ou représenter par un membre de l'entreprise. En revanche, les parties ne peuvent pas se faire assister par leurs enfants.

Qu'est-ce qu'un référé prud'homal ?

Le référé prud'homal est une procédure d'urgence permettant d'obtenir rapidement des mesures ordonnées par le conseil de prud'hommes pour un litige en lien avec le contrat de travail. En pratique, le référé aux prud'hommes est fréquemment utiliser pour obtenir le paiement de salaires non-versés, faire annuler une sanction ou faire délivrer un bulletin de paie ou une attestation Pôle emploi.

Une formation de référé se trouve dans chaque conseil de prud'hommes. Elle est composée d'un conseiller prud'homme salarié et d'un conseiller prud'homme employeur.

Le référé prud'homal vise à obtenir une décision du conseil des prud'hommes permettant, dans tous les cas d'urgence, d'ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

En pratique, il s'agit des affaires « simples » dont la solution parait a priori évidente au regard des éléments apportés. Exemple : un salarié a quitté son entreprise mais son employeur ne lui a pas remis son certificat de travail. Autre exemple : un salarié réclame un salaire que son employeur ne lui paye plus alors qu'il dispose d'un contrat de travail, de fiches de paye et de preuves qu'il travaille chaque jour dans les locaux de son entreprise. Cependant, même en cas de contestation sérieuse, la formation de référé peut prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite (lorsqu'il existe un danger pour la sécurité des salariés par exemple). Elle peut également accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution d'une obligation lorsque l'existence de celle-ci n'est pas sérieusement contestable.

La formation de référé peut également décider de renvoyer l'affaire devant le bureau de jugement lorsqu'il lui apparaît que la demande formée devant elle présente une particulière urgence mais qu'elle excède ses pouvoirs.

A l'inverse, le référé prud'homal ne concerne pas les affaires où le fond est plus complexe, fait l'objet de contestations et/ou nécessite un examen approfondi des éléments apportés. C'est par exemple le cas des contestations de licenciement. Dans ce cas, le salarié devra saisir les prud'hommes selon la procédure classique.

Quelle est la procédure du référé prud'homal ?

La procédure du référé prud'homal est naturellement marquée par sa rapidité. Le conseil de prud'hommes est saisi par un courrier adressé en recommandé ou déposé au greffe de la juridiction. Il comprend le formulaire cerfa 15586 à remplir pour saisir les prud'hommes. Le greffe informe alors le demandeur des lieu, jour et heure de la séance à laquelle l'affaire sera appelée.

Cette demande peut également être formée par acte d'huissier de justice et dans ce cas une copie de l'assignation doit alors être déposée au greffe du conseil au plus tard la veille de l'audience. Entre l'assignation et l'audience, il doit s'être écoulé un temps suffisant pour que la partie assignée ait pu préparer sa défense. Le recours à un avocat n'est pas obligatoire, sauf si la demande porte sur une somme supérieure à 10 000 euros.

L'audience du référé prud'homal est publique et présidée par l'un des deux conseillers. Il n'existe pas de phase de conciliation préalable contrairement à la procédure prud'homale classique. Les débats entre les parties ont lieu à l'oral. A l'issue de l'audience, les conseillers délibèrent et rendent une ordonnance soit le jour même, soit à une date ultérieure fixée par le tribunal.

Les mesures ordonnées en référé sont immédiatement exécutoires. La décision rendue en référé peut faire l'objet d'un recours par le biais d'un appel formé dans un délai de 15 jours francs. La demande est alors portée devant la chambre sociale de la cour d'appel. L'appel n'est pas suspensif : les mesures ordonnées en référé restent exécutoires à titre provisoire.

Un employeur poursuivi aux prud'hommes peut-il me licencier ?

L'employeur ne peut pas vous licencier au prétexte que vous agissez contre lui devant les prud'hommes. Il s'agirait d'une atteinte à une liberté fondamentale. Un licenciement doit ainsi être considéré comme nul dès lors que la lettre de notification de licenciement mentionne que la décision de rompre le contrat de travail repose en partie sur le fait que le salarié ait saisi les prud'hommes (arrêt 15-28085 rendu par la chambre sociale de la Cour de Cassation le 8 février 2017).

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