Charges de copropriété : calcul, répartition, recouvrement

"Charges de copropriété : calcul, répartition, recouvrement"

Les charges de copropriété doivent être payées par tous les copropriétaires selon les modalités de calcul et de répartition légales. Les règles en matière de paiement, d'appels de fonds, de recouvrement et de charges impayées.

Dans les immeubles en copropriété, le paiement des charges est souvent une source de litiges. Mieux vaut donc bien connaître les règles de répartition, de calcul et de paiement des charges de copropriété pour limiter les risques de contentieux.

Quelles sont les charges de copropriété ?

Les charges de copropriété désignent les contributions que doivent verser les copropriétaires en vue du paiement des frais et des dépenses nécessaires au fonctionnement d'une copropriété. Ces coûts comprennent notamment les frais d'administration, d'entretien et de conservation de l'immeuble. En principe, tout copropriétaire peut consulter les justificatifs de charges de copropriété.

Quelles sont les charges récupérables sur un locataire ?

Dans le cadre d'une location, les charges locatives doivent être payées par le locataire. Leur montant est généralement intégré dans le montant du loyer à payer. On parle alors de "loyer charges comprises" (CC).

Le montant à payer chaque mois au bailleur comprend en effet le loyer proprement dit, mais aussi une provision pour charges imputables au locataire : la consommation d'eau, l'entretien des parties communes, les charges d'ascenseur, etc. Ces charges locatives mensuelles peuvent parfois atteindre une somme importante. Dans les annonces de locations, l'expression « charges comprises » permet ainsi de s'assurer que le montant indiqué comprend bien leur montant. Le montant d'un loyer indiqué sans les charges peut en effet être bien inférieur au montant que le locataire devra réellement verser chaque mois.

Comment fonctionne la répartition des charges ?

L'article 10 de la loi du 10 juillet 1965 distingue deux catégories de charges de copropriété. Les règles de répartition de ces charges entre les copropriétaires diffèrent selon qu'il s'agit de charges de conservation, d'entretien et d'administration ou de charges relatives aux services collectifs et aux équipements communs.

Les charges de conservation, d'entretien et d'administration

Ces charges générales couvrent les dépenses :

  • de conservation : ravalements, réfection du gros oeuvre, des canalisations, des couloirs, etc.
  • d'entretien : produits d'entretien, rémunération des personnes chargées de l'entretien, frais de nettoyage et d'éclairage, entretien des espaces verts, etc.
  • d'administration : primes d'assurances, honoraires du syndic, impôts et taxes, salaire du gardien, frais de procédure, etc.

Ces charges communes sont réparties entre tous les copropriétaires en fonction de leur quote-part des parties communes, quote-part qui tient compte de la valeur relative du lot concerné.

La quote-part tient donc compte non seulement de la superficie du lot, mais aussi de sa consistance (degré de confort, type d'aménagement intérieur, etc.), de sa situation (étage, exposition, etc.). C'est ce mode de répartition qui est employé notamment pour les frais liés aux escaliers (réfection intérieure des paliers, réparation de l'escalier, etc.) que doivent régler tous les copropriétaires, même ceux dont le lot est situé au rez-de-chaussée. Il en est de même des frais de gardiennage. Les propriétaires de parkings doivent participer à ces charges générales. Quand il existe des parties communes particulières, certaines charges générales peuvent être affectées aux seuls lots concernés. Exemples : une voie qui dessert seulement certains copropriétaires, des charges d'entretien d'un bâtiment affectées aux seuls copropriétaires concernés.

Les charges relatives aux services collectifs et aux équipements communs

Ces charges spéciales varient selon les immeubles. Il s'agit essentiellement des dépenses liées aux raccordements collectifs audiovisuels (antenne de TV, câble, etc.), aux ascenseurs, au chauffage central, aux interphones et digicodes, aux gaines de vide-ordures, à la climatisation, etc. Elles englobent l'ensemble des dépenses, y compris les frais d'entretien et de réparation.

Ces charges spéciales sont réparties en fonction de l'utilité du service ou de l'équipement concernés pour chaque lot. Si un service ou un équipement n'est d'aucune utilité pour un lot, aucune charge ne peut lui être imputée.

Exemple classique : la répartition des dépenses liées à l'ascenseur tiendra compte de l'étage de chaque lot, les étages élevés payant davantage que les étages inférieurs. Les lots du rez-de-chaussée n'auront rien à payer, sauf s'ils possèdent un parking ou une cave desservi par l'ascenseur. Autre exemple : aucune dépense liée aux antennes collectives ou au chauffage n'est imputée aux lots de parking. Précision importante : il s'agit de l'utilité objective et non de l'usage effectif que le copropriétaire fait du service ou de l'équipement en question. Exemple : le copropriétaire du 5ème étage paiera sa part des dépenses d'ascenseur même s'il monte toujours à pied ou s'il n'est présent que deux mois dans l'année... L'utilité objective tient compte de la nature du lot (étage, mais aussi surface, hauteur sous plafond, affectation, etc.). Exemple : la répartition tiendra compte du caractère professionnel d'un local en étage puisque la réception de clients entraîne un surcroît de dépenses d'ascenseur.

Comment demander une nouvelle répartition en AG ?

Un copropriétaire peut parfois estimer que la répartition des charges de copropriété a été mal établie ou doit être recalculée. Il peut alors faire une demande afin qu'une nouvelle réparation soit établie. Si une modification survient (exemple : lorsqu'un autre copropriétaire fait aménager des combles et agrandit son appartement), tout copropriétaire peut faire à tout moment constater l'absence de conformité de la clause de répartition des charges à la valeur relative de chaque lot et demander une nouvelle répartition. Pour un exemple, voir l'arrêt n° 14-26921 rendu par la 3e chambre civile de la Cour de Cassation le 28 janvier 2016.

La modification des charges définie par le règlement de copropriété ne peut se faire qu'à l'unanimité de tous les copropriétaires. Dans certains cas, la modification est demandée à la suite d'un changement intervenu dans l'immeuble : modification d'affectation d'un lot, agrandissement ou division d'un lot, installation d'un service ou équipement nouveau. La modification de la répartition des charges peut être décidée à la même majorité nécessaire pour autoriser le changement en question.

Peut-on contester ses charges en justice ?

Un copropriétaire peut considérer que sa quote-part de charges générales ou spéciales, définie dans le règlement de copropriété, est trop importante. Par rapport, par exemple, à la superficie du lot ou à l'utilité du service. Il ne peut intenter une action devant le tribunal judiciaire (TJ) que dans deux cas :

  • quand il estime que sa participation est supérieure de plus de 25% à ce qu'elle devrait être,
  • quand il estime que la participation d'un autre copropriétaire est inférieure de plus de 25% à ce qu'elle devrait être.
L'action doit être intentée dans les cinq ans qui suivent la publication du règlement de copropriété. Ou dans les deux ans qui suivent la première vente d'un lot, après la publication de ce règlement.

Un copropriétaire peut penser que la répartition des charges ne respecte pas les principes fixés par la loi. Il peut alors intenter une action en nullité à tout moment. Exemple : son lot situé au rez-de-chaussée supporte des frais d'ascenseur.

Dans les deux cas précédents, la nouvelle modification fixée par le juge ne joue que pour l'avenir. Le copropriétaire lésé ne peut prétendre à aucun rappel. Si l'assemblée générale commet une erreur dans la répartition des charges, par rapport aux règles fixées dans le règlement de copropriété, la décision doit être contestée dans les deux mois qui suivent.

Quels appels de charges peuvent être demandés ?

Le syndic peut demander aux copropriétaires plusieurs types de paiements.

  • L'avance permanente de trésorerie ou « fonds de roulement », destinée à faire face aux dépenses imprévues et aux impayés. Elle est payée lors de l'achat du lot. Son principe et son montant sont prévus dans le règlement de copropriété ou votés en AG à la majorité de l'article 26 (majorité de tous les copropriétaires et deux tiers de voix). Cette avance ne peut dépasser 1/6ème du budget prévisionnel. Cette avance permanente doit être remboursée au vendeur en cas de vente de son lot.
  • Les provisions trimestrielles du budget prévisionnel, voté avant le début de l'exercice. Elles sont demandées par lettre simple et l'AG peut en modifier le rythme et le montant. Ces charges sont ensuite régularisées en fonction du budget réel.
  • Les éventuels appels de charges pour les dépenses et travaux non compris dans le budget prévisionnel. Leur montant et leur rythme de paiement sont votés par l'AG.
  • Les éventuels appels de charges pour faire face à des travaux d'entretien ou de conservation de l'immeuble ou de ses éléments d'équipement susceptibles d'intervenir dans les trois ans mais non encore votés. Ces provisions spéciales sont décidées par l'AG sur proposition du syndic au moins une fois tous les trois ans. Si un copropriétaire vend son lot avant que ces provisions ne soient utilisées, il peut en demander le remboursement.
  • Les éventuels appels de charges correspondant à un plan pluriannuel de gros travaux voté par l'AG.
  • Le syndic peut aussi demander le versement de provisions spéciales en cours d'exercice pour faire face à des travaux urgents. Leur montant ne peut dépasser le tiers du devis.

Que faire si un copropriétaire ne paye pas ses charges ?

C'est au syndic qu'incombe la responsabilité de recouvrer les sommes dues par les copropriétaires. Toute négligence de sa part peut être sanctionnée. Après une démarche amiable auprès du copropriétaire défaillant, le syndic doit lui adresser une mise en demeure par courrier recommandé.

Aucune action en recouvrement de charges ne peut être intentée après un délai de dix ans. Le syndicat doit mettre en oeuvre toutes les procédures légales de recouvrement. L'autorisation de l'assemblée générale n'est exigée que pour une éventuelle saisie immobilière sur le lot concerné.

Quelle sanction en cas de charges impayées ?

Si un copropriétaire n'a pas versé la provision exigée à la date prévue, les autres provisions non encore échues deviennent exigibles un mois après la réception d'une lettre recommandée restée sans effet. Le syndic pourra saisir le tribunal judiciaire qui pourra ordonner le paiement des provisions devenues exigibles, en autorisant, éventuellement, une saisie sur les loyers s'il s'agit d'un copropriétaire-bailleur.

Dès réception de la lettre recommandée, le copropriétaire défaillant peut se voir infliger des intérêts de retard, dans la limite du taux de l'intérêt légal. Ces intérêts sont perçus au profit du syndicat des copropriétaires (et non du syndic). Des pénalités supplémentaires peuvent également être prévues par le règlement de copropriété ou l'assemblée générale des copropriétaires. Au-delà des intérêts de retard et des éventuelles pénalités, le syndicat des copropriétaires peut également demander en justice le versement de dommages-intérêts s'il a subi un préjudice.

Qui paye les frais de relance et de procédure ?

Les frais de relance engagés avant toute décision de justice (frais de syndic, frais d'avocat, honoraires d'huissier, etc.) restent en principe à la charge du créancier et ne peuvent donc pas être facturés au débiteur. Avec une précision : le syndic pourra mettre à la charge du copropriétaire défaillant les frais nécessaires au recouvrement des impayés. Les frais de relance et de recouvrement passent donc à la charge du copropriétaire défaillant dès lors qu'il s'agit d'actes résultant de l'application de la loi ou d'une décision de justice.

Conséquence : les frais d'envoi de la lettre recommandée sont imputables au débiteur puisque cette mise en demeure est exigée par l'article 36 du décret du 17 mars 1967. Il en est de même des frais de commandement d'huissier avant la prise d'hypothèque, cette procédure étant prévue par l'article 19 de la loi du 10 juillet 1965. Naturellement, toutes les dépenses nécessaires à l'application de la décision de justice sont ensuite à la charge du débiteur. Dans certains cas, notamment quand le débiteur est de mauvaise foi, le tribunal peut le condamner à payer tout ou partie des frais de relance engagés par le syndicat des copropriétaires.

Charges impayées et hypothèque

Le syndic peut récupérer le montant des charges impayées en gérant la mise en oeuvre d'une hypothèque sans avoir à recourir à l'autorisation préalable de l'assemblée générale des copropriétaires. La somme pourra alors être récupérée sur les meubles présents dans les locaux du copropriétaire défaillant, mais aussi sur les loyers dus par son locataire si le logement concerné est en location.

Répartition usufruit et nue-propriété

Quand le bien est démembré, l'usufruitier est redevable de tous les travaux liés à la jouissance du bien (entretien, assurance, etc.). Les grosses réparations sont à la charge du nu-propriétaire (art. 605 du Code civil). Aucune solidarité ne lie en principe les titulaires de droits ainsi démembrés. Le règlement de copropriété peut toutefois contenir une clause de solidarité entre indivisaires ou entre nu-propriétaire et usufruitier. La première de ces clauses en général est validée par les tribunaux. La deuxième peut donner lieu à contestation.

Garanties

Le syndic peut prendre une hypothèque sur le lot du copropriétaire défaillant après un premier commandement de payer resté infructueux. Le syndicat des copropriétaires bénéficie également d'une « super-garantie » en cas de vente du lot. Il sera payé en priorité, avant tous les autres créanciers, pour les dettes liées aux charges et travaux de l'année en cours et des deux années précédentes.

Droit de la copropriété