Modification des horaires de travail du salarié : vos droits

"Modification des horaires de travail du salarié : vos droits"

Il est fréquent qu'un employeur souhaite changer les horaires de travail d'un salarié. Les règles à connaitre pour savoir s'il peut le faire sans son accord.

Un employeur peut-il modifier les horaires de travail sans l'accord du salarié ?

Un employeur peut en principe librement modifier les horaires de travail de ses salariés sans obtenir leur accord préalable. Selon la jurisprudence (arrêt n° 10-14702 rendu par la chambre sociale de la Cour de Cassation le 3 novembre 2011), le changement des horaires relève de son pouvoir de direction. Une entreprise peut donc par exemple demander à ses salariés d'arriver au travail et de le quitter plus tôt ou plus tard en changeant leurs horaires journaliers. Dès lors qu'il respecte la durée contractuelle du travail, l'employeur peut également modifier la répartition des horaires de la semaine. Il s'agit, là encore, d'un simple changement des modalités d'exécution du contrat de travail auquel le salarié ne peut s'opposer. La Cour de Cassation (arrêt n° 98-42264 rendu par la chambre sociale le 17 octobre 2000) a ainsi donné raison à un employeur qui avait demandé à une salariée de venir désormais un samedi matin sur deux par roulement, sans changer la durée totale du travail.

Le changement des horaires peut toutefois nécessiter l'accord du salarié dans certaines situations. Rappelons d'abord que la modification envisagée doit dans tous les cas s'effectuer dans le cadre de la durée du travail fixée dans le contrat, faute de quoi elle exige naturellement l'accord du salarié. Il en est de même si les horaires en cause sont précisés dans le contrat. Le changement d'horaires ne doit pas non plus augmenter la durée fixée par le contrat de travail ou diminuer la rémunération touchée par le salarié.

Pour la jurisprudence (arrêt n° 10-14702 rendu par la chambre sociale de la Cour de Cassation le 3 novembre 2011), le changement d'horaires ne doit pas non plus constituer une atteinte excessive au droit du salarié au respect de sa vie personnelle et familiale ou à son droit au repos. Dans le cas contraire, le salarié pourra légitimement refuser la modification des heures. Dans le même sens, l'accord du salarié sera nécessaire dès lors que le changement d'horaires emporte une modification du contrat de travail. Ce dernier est en effet un contrat comme les autres : il ne peut donc être modifié qu'avec l'accord des deux parties. Pour les juges (arrêt n° 21-10147 rendu par la chambre sociale de la Cour de Cassation le 16 mars 2022), le passage d'un horaire continu à un horaire discontinu entraîne par exemple une modification du contrat de travail que le salarié est en droit de refuser. Il en est de même du passage d'un horaire de jour à un horaire de nuit, selon une jurisprudence constante. Toujours selon la jurisprudence, de nouveaux horaires de travail privant une salariée de repos le dimanche et entraînant le passage d'un horaire fixe à un horaire variable par cycle constituent une modification du contrat de travail (arrêt n° 22-12994 rendu par la chambre sociale de la Cour de Cassation le 5 juillet 2023).

Que se passe-t-il en cas de refus du salarié de modifier ses horaires ?

Si la modification des horaires ne nécessite pas l'accord du salarié mais que celui-ci refuse quand même ce changement, l'employeur peut en principe le licencier pour faute grave, sans indemnité. Mais cette règle générale doit toutefois être nuancée. En cas de litige, les juges vérifieront tout d'abord que l'employeur n'abuse pas de son pouvoir de direction et que les changements imposés reposent sur un motif sérieux. Les tribunaux sanctionneraient vraisemblablement un employeur qui demanderait à un salarié de venir travailler le samedi sans raison valable, uniquement dans l'espoir qu'un refus de sa part lui permettrait de s'en "débarrasser" à bon compte...

Autre principe pouvant être nuancé par les tribunaux : celui de la faute grave en cas de refus de changement d'horaires. La chambre sociale de la Cour de Cassation (arrêt n° 96-41414 rendu le 4 juin 1998) avait admis que le refus d'un salarié d'accepter une modification de ses conditions de travail ne constituait pas nécessairement une faute grave. C'est donc aux juges de contrôler, au cas par cas, la qualification de la faute en prenant notamment en compte la personnalité du salarié (présence d'enfants en bas âge, ancienneté, etc.). S'ils considèrent que le refus est assimilable à une faute légère, le salarié pourra percevoir son indemnité de licenciement.

En revanche, si la modification des horaires nécessite l'accord du salarié et que ce dernier la refuse, l'employeur n'a qu'une alternative : soit il abandonne son projet, soit il engage une procédure de licenciement en bonne et due forme en payant toutes les indemnités dues au salarié. Et en cas de conflit, il devra justifier, devant les tribunaux, que la modification étant indispensable à la bonne marche de l'entreprise, faute de quoi le licenciement sera jugé sans cause réelle et sérieuse et le salarié pourra obtenir des dommages-intérêts.

  • Cour de Cassation, arrêt n° 10-14702 : https://www.courdecassation.fr/decision/6079c0d99ba5988459c57292
  • Légifrance, arrêt de la Cour de Cassation n° 98-42264 : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007041361/
  • Cour de Cassation, arrêt n° 21-10147 : https://www.courdecassation.fr/decision/62318cc8bbb5263484095157
  • Légifrance, arrêt de la Cour de Cassation n° 96-41414 : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007037836
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