Controle fiscal dramatique

Nobilan - 9 avril 2009 à 13:28
 giana - 10 avril 2009 à 15:22
Bonjour,

Jusqu'en 1992, je gagnais correctement ma vie comme cadre. Fin 1992, suite à un incident de parcours indépendant de ma volonté, je me retrouve au RMI. Ma femme se tire et obtient le versement d'une pension alimentaire pour notre unique enfant dont la garde lui est confiée.

Les maigres économies dont je dispose à l'époque me permettent de constituer une Sarl au capital de 50 000 francs qui aurait dû me permettre de sortir du RMI. Mais, coup de chance ou pas, je retrouve un emploi de cadre en 1993, à temps partiel, dans ma profession. La société que j'ai montée n'a donc aucune d'activité mais je décide de la garder, au cas où...

Mes revenus de l'époque ne me permettent pas de solder mes impôts sur le revenu et mon salaire est largement saisi par l'administration fiscale. Commence alors une longue période de galère. En 1994, la mort dans l'âme, je dépose un dossier de surendettement. Ce dossier est accepté et je bénéficie d'un moratoire de cinq ans, jusqu'en 1999.

Mais, en juin 1999, l'entreprise dans laquelle je travaille a des difficultés et je suis licencié pour motif économique... C'est le coup classique du cadre de 50 ans avec une longue période de chômage pendant laquelle je ne retrouve évidemment pas de travail malgré mes efforts de recherche.

Toujours est-il que je décide de créer une boutique de vente en ligne sur internet. Mais ce sont quasiment les balbutiements d'internet en France, les clients ne se précipitent pas et le stock de produits n'est pas à la hauteur de ce que les clients attendent. J'ai bricolé le site moi-même et il n'est pas très performant. La rentabilité s'en ressent mais j'arrive néanmoins à en tirer de maigres revenus. Evidemment, la société est déficitaire mais j'ai absolument besoin de cet outil pour m'en sortir, pour essayer de gagner la vie sans compter sur les autres. Je suis contrait de recapitaliser. Grâce aux aides d'amis et de la famille, le capital est doublé. J'aurais probablement mieux fait de laisser tomber cette société et d'un créer une autre, mais je ne suis pas à l'abri d'une erreur d'appréciation, d'autant qu'à cette époque, je suis suivi médicalement pour un état dépressif aussi logique que classique, doublé de problèmes cardiaques.

La galère se poursuit jusqu'à fin 1994, cahin-caha. Je rappelle que le moratoire vient de se terminer : mes créanciers (fisc, caisses sécu/retraite) me retombent dessus avec le long et pénible défilé des huissiers de justice auxquels je dois faire des promesses qu'il ne m'est pas possible de tenir. C'est très, très pénible, voire insupportable. La pression est énorme et mon état de santé ne s'en ressent gravement.

Fin 1994, un miracle : je rencontre une personne qui travaillait sur internet aux Etats-Unis et qui accepte de me donner un coup de main. Je décide de quitter la France sans laisser d'adresse, mes amis de trente ans et tous mes repères, et je pars m'installer avec elle dans un pays étranger dont je ne parle pas la langue. Ce n'est pas si facile. Le site est complètement restructuré par ma compagne. C'est du vrai travail de pro. Elle s'investit jusque dans une participation financière : elle achète du stock avec ses fonds propres pour je puisse proposer ces produits à la vente. Et puis, je n'ai plus de soucis au quotidien puisque je suis hébergé et nourri. En 1996, le site internet me permet de dégager un petit revenu et cela s'améliore lors des deux années suivantes.

La grosse bêtise a été de continuer à se servir de la société existante plutôt que de repartir à zéro. Mais nous n'avions pas les connaissances nécessaires pour comprendre que nous exposions à des problèmes. Du fait que nous vivons à l'étranger, nous pensions que nous n'avions rien à voir avec l'administration française... Grave erreur!

Je suppose que l'administration fiscale m'a retrouvé par le biais de la banque qui assure le paiement en ligne des commandes du site internet en France. Elle me demande donc de lui fournir les bilans et et les justificatifs des années 2006, 2007 et 2008 et m'annonce la visite d'un inspecteur au siège de la société en France pour le 20 avril prochain. Comme le siège de la société était mon domicile, il est vide depuis 2005 et il n'y aura personne pour recevoir cet inspecteur.

Alors, de multiples questions se posent pour la suite des événements :

- comme il n'y a ni bilans comptables ni pièces justificatives, sur quels critère l'administration fiscale française va-t-elle se baser pour établir les inévitables sanctions?
- il est probable que le dépôt de bilan de la société est inévitable. Quelles en seront les conséquences?
- quelle attitude dois-je adopter face à l'administration?
- quels sont les argument que je devrais faire valoir pour essayer de minimiser les sanctions?
- quels sont les risques que je cours à titre personnel en tant que gérant de la société?
- au cas où il y aurait un risque de saisie des biens personnels, est-ce que je risque la prison étant donné que je ne suis pas solvable et que je ne dispose pas de biens personnels à part une voiture d'occasion?

Soyez sympas, comme je n'ai pas les moyens de me payer les services d'un bon avocat fiscaliste, si vous connaissez la réponses à mes questions, répondez-y aussi précisément que possible. J'ai maintenant 60 ans, ma santé est fragile, et je n'ai vraiment pas envie de me retrouver à nouveau dans les galères que j'ai déjà vécues, voire pire!...

Merci d'avance pour votre aide précieuse.

1 réponse

Bonjour, je suis étudiante stagiaire en fiscalité et je vais essayer de répondre à vos questions. Je précise que mes réponses sont théoriques puisque je suis en formation- je n'ai pas forcément le recul nécessaire!

Tout d'abord, il faut préciser que votre société créée et immatriculée en France, avec une activité en France (c'est ce que je crois comprendre si les ventes sur internet ont lieu en France), est obligatoirement soumise à l'impot français: Impot sur les sociétés et Tva principalement.

- le contrôle qui concerne les 3 dernières années consiste ici pour l'administration en l'exercice du droit de communication des documents comptables et la vérification de comptabilité: le défaut de présentation de la compta ou des documents en tenant lieu est constaté dans un procès verbal (qui par la suite , dans la procédure contentieuse s'il y en a une mettra à votre charge la preuve- cette procédure contentieuse intervient après le recouvrement des sommes dues par l'administration si vous décidez de demander une décharge ou une réduction des sommes payées).
Le rejet de la comptabilité est ce qui vous guette (cas de non-présentation): le vérificateur détermine les bases d'imposition à l'aide de tous les éléments dont il dispose: notamment il peut reconstituer le montant des recettes en appliquant un coef. de bénéfice brut sur achats au prix de revient des marchandises. Dans votre cas, il pourrait peut-être aussi s'appuyer sur les données informatiques de votre site? Je ne saurai dire.
Le contrôleur peut aussi constater un enrichissement de l'exploitant ou des ses associés et se fonder dessus pour reconstituer le chiffre d'affaires et le bénéfice. N'oubliez pas qu'ils ont accès à beaucoup de données extérieures!

De tout cela va découler sans doute une procédure de redressement-on parle de 1) rectification ou 2) d'imposition d'office. Cette dernière est plus violente car non contradictoire: elle se déroule sans que le contribuable soit invité à présenter sa position et elle met à sa charge la preuve s'il conteste l'imposition devant les tribunaux.
Or il me semble que votre absence au siège social et le fait de trouver les locaux vides pourrait être interprété comme une opposition au contrôle fiscal. Et c'est un cas qui entraîne la taxation d'office. Je vous conseillerai donc d'avertir promptement votre vérificateur du déménagement des locaux et d'expliquer où vous êtes et pourquoi.
De manière générale, la bonne foi est et sera votre principal moyen de défense. En l'occurrence vous êtes en tort vis à vis de la législation fiscale donc je vous conseille d'exposer votre situation de manière claire.

La bonne foi joue aussi pour les sanctions puisque il y a deux sortes de pénalités: de retard (auxquelles vous n'échapperez sans doute pas) et les pénalités de mauvaise foi- dites de manquement délibéré que vous pourrez peut-être vous épargner.
Une fois l'imposition mise en recouvrement, vous pourrez toujours présenter une réclamation mais il faudra apporter la preuve que les sommes exigées sont exagérées.

Au niveau des sanctions pénales, l’opposition individuelle au contrôle fiscal est également passible de peines correctionnelles. Et le délit de fraude fiscale, bien que rare, est caractérisé dès qu’on prouve une intention frauduleuse de se soustraire à l’impôt. Donc je me répète, montrez vous coopératif avec l’administration.
Préparez et présentez tous les justificatifs de votre situation financière.

- concernant le dépôt de bilan, les conséquences que je vois sont:
- le paiement des créanciers sur le solde de la liquidation,
- des sanctions éventuelles comme une interdiction de gérer, le comblement de passif (condamnation à payer sur vos biens propres en tant que gérant mais il faut une faute de gestion, ce qui n’est pas votre cas il me semble). Je ne crois pas qu’on vous mette en prison pour ne pas avoir d’argent! Je ne sais pas par contre si l’étendue de votre insolvabilité peut aller jusqu’à la faillite personnelle mais c’est à envisager.
Dans le cadre de la liquidation, votre amie pourrait éventuellement être attraite aussi devant le tribunal de commerce comme cogérant ou associée de fait puisque vous dites qu’elle a investi dans la société. Auquel cas, elle risquerait grosso modo les mêmes sanctions. C’est à voir.

Pour finir, je vous conseille malgré tout de voir un avocat si vous en avez la possibilité. Même pour une consultation unique. Vu la situation, ce ne serait vraiment pas du luxe !
Et aussi de songer à jeter un coup d’œil sur les conventions fiscales entre la France et votre pays d’accueil. Cela peut peut-être utile.

Je vous souhaite bon courage. Cordialement.
6