Rupture période d'essai, commissions en cours

Résolu
flow06 - 30 mai 2012 à 20:22
expert56 Messages postés 568 Date d'inscription jeudi 8 mars 2012 Statut Membre Dernière intervention 16 octobre 2013 - 3 juin 2012 à 14:02
Bonjour,

J'ai été embauché il y a 6 mois comme commercial.

J'ai signé un contrat, qui ne stipulait pas mes objectifs ni ma rémunération variable.
On m'a dit que ces éléments seraient fournis "plus tard" dans un avenant.
Depuis ce temps, je demande régulièrement à recevoir l'avenant, qui n'est toujours pas venu.

La semaine dernière, on m'annonce sans prévenir que je n'atteins pas mes objectifs et que mon employeur rompt la période d'essai dans un mois (préavis).
Je dois rendre mon matériel (téléphone, véhicule, ordinateur) et pendant cette période je suis dispensé de ma présence et je peux demeurer à mon domicile.

1 - Mon employeur peut il rompre ainsi ma période d'essai sans m'avoir donné mes objectifs et commissionnement (utiles à la bonne réalisation de ma mission de commercial)?

2- Ces dernières semaines, j'ai travaillé dur pour gagner certaines affaires et il ne reste plus qu'à relancer les clients et à répondre à leurs questions pour gagner l'affaire. Je n'ai aucune idée de si les clients seront suivis. Est-ce normal de perdre ainsi l'avancement sur mon travail? Puis-je être commissionné si l'entreprise gagne ces affaires?

Merci beaucoup pour votre aide.

2 réponses

Effectivement nous pouvions l'un comme l'autre rompre sans motifs ni indemnités. Pour le préavis c'est un peu plus complexe, au delà de 4 mois l'employeur doit respecter un préavis d'un mois, ce qu'il a fait.

Etant cadre, ma période d'essai était de 4 mois renouvelable une fois (documents signés).

Le problème est que je n'ai aucune preuve écrite, mon manager ne communiquant quasiment exclusivement qu'à l'oral... :/ :)
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expert56 Messages postés 568 Date d'inscription jeudi 8 mars 2012 Statut Membre Dernière intervention 16 octobre 2013 171
2 juin 2012 à 18:00
La législation est claire et nette sur votre sujet:

-Les objectifs doivent êtres mesurables, identifiables, et bien sûr réalisables. Afin d'être valides ils doivent faire l'objet d'un écrit mis à la connaissance du salarié.
L'un des éléments fondamentaux manquants, cela rend le motif du licenciement légalement illégitime.

-Le renouvellement de la période d'essai doit se faire avec concertation préalable du salarié (mais sans son avis) et bien sûr écrit à l'appui avec signature.
Si aucun écrit existe, la période d'essai est réputée terminé après la date initiale.

Si le premier point n'est pas satisfait, le licenciement sera déclaré sans motif réel et sérieux donc dommages et intérêts et possibilité de réintégration du salarié déchu.
Si le second point n'est pas respecté, vice de forme de la procédure de licenciement légale et donc licenciement caduc et dommages et intérêts et réintégration du salarié.

Bon, là il s'agit de mes connaissances théoriques.Mais maintenant en pratique si le renouvellement de la période d'essai est bon, la rupture de cette période par votre employeur ne soulèvera d'aucune contestation si ce dernier ne justifie rien par écrit.

S'il vous envoi un courrier disant on rompt votre période d'essai pour non atteinte de vos objectifs, vous serez en mesure d'intenter une action, mais si aucun motif n'est donné (droit de l'employeur et d'ailleurs fortement conseillé pour lui) alors vous ne pourrez malheureusement rien faire.....

Bonne continuation
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Merci :)

"-Les objectifs doivent êtres mesurables, identifiables, et bien sûr réalisables. Afin d'être valides ils doivent faire l'objet d'un écrit mis à la connaissance du salarié. "

Par curiosité, où est-ce mentionné dans la loi ?

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Période d'essai renouvelée, tout est bon, pas d'écrit pour la non-atteinte des objectifs, forcéments, c'est raté pour moi, merci quand même :)
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expert56 Messages postés 568 Date d'inscription jeudi 8 mars 2012 Statut Membre Dernière intervention 16 octobre 2013 171
3 juin 2012 à 13:11
Si l'employeur peut fixer unilatéralement les objectifs, cette fixation n'a qu'une portée limitée dans la mesure où le juge exerce un contrôle strict sur le licenciement pour objectifs non atteints. En effet, la seule insuffisance de résultats ne peut, en soi, constituer une cause de licenciement (Cass. soc., 30 mars 1999, no 97-41.028). Par conséquent, en cas de contentieux, le juge ne peut pas se contenter de constater que le salarié n'a pas atteint ses objectifs et en déduire que le licenciement est justifié. Il doit s'assurer :

que les objectifs fixés étaient réalistes et réalisables ;
que les résultats du salarié sont véritablement mauvais et qu'ils procèdent soit d'une insuffisance professionnelle, soit d'une faute.

Le juge doit donc évaluer les objectifs fixés et la performance du salarié.
Évaluation des objectifs
Le juge doit apprécier, au cas par cas, si les objectifs imposés au salarié étaient réalistes (Cass. soc., 13 mars 2001, no 99-41.812), et ce, même si :

les objectifs ont été fixés contractuellement et acceptés expressément par le salarié (Cass. soc., 24 mai 2000, no 98-42.981) ;
le salarié ne soutient pas que ses objectifs étaient irréalistes (Cass. soc. 13 mars 2001 no 99-41-812).

Concrètement, le juge va se poser les questions suivantes.

Dans quelles conditions le salarié exerce-t-il son activité ?

Le juge qui évalue le caractère réaliste des objectifs doit tenir compte des conditions d'exercice de l'activité du salarié. L'insuffisance de résultats ne peut pas être reprochée à des salariés qui n'ont pas de prise sur ces résultats.
Ainsi, l'employeur d'une vendeuse ne peut pas lui reprocher la baisse du chiffre d'affaires de la boutique dans laquelle elle travaille car sa qualification exclut toute prise d'initiative en dehors des instructions de l'employeur (Cass. soc., 12 juill. 2000, no 98-42.538). De même, le licenciement d'un directeur de magasin pour objectifs non atteints n'est pas justifié lorsque les objectifs sont difficiles à atteindre du fait des conditions d'exploitation du magasin et de la faible marge de manoeuvre dont dispose le salarié (Cass. soc., 3 févr. 1999, no 97-40.606).

Quelle est la conjoncture économique ?

Le salarié est tenu d'une obligation de moyens et non pas de résultat. Par conséquent, il ne peut être jugé responsable des aléas de la conjoncture économique. Les objectifs imposés doivent donc être compatibles avec l'état du marché (Cass. soc., 19 avr. 2000, no 98-40.124). Le licenciement pour objectifs non atteints est sans cause réelle et sérieuse lorsque les objectifs sont irréalistes compte tenu de la situation du marché (Cass. soc., 2 déc. 2003 no 01-44.192). En outre, les documents dans lesquels l'entreprise ou l'employeur admettent que la conjoncture économique est difficile constituent souvent un indice de ce que l'objectif était irréalisable (CA Versailles, 11e ch. soc., 17 déc. 1997 SA Bertin et Cie c/ Barjhoux).
Quels étaient les objectifs antérieurement fixés au salarié ou à son prédécesseur ?
Les objectifs sont le plus souvent jugés irréalistes lorsqu'ils sont en très forte augmentation par rapport à ceux fixés au salarié lui-même ou à son prédécesseur au cours des années précédentes. C'est notamment le cas lorsque les objectifs ont été :

augmentés de 100 % par rapport aux deux années précédentes (Cass. soc., 13 juill. 1989, no 86-45.201) ;
augmentés de 33 % sur une période de 6 mois (CA Versailles, 5e ch. B, 12 févr. 1998, SA Ista c/Godefroid) ;
multipliés par quatre par rapport à ceux imposés au salarié occupant le poste l'année précédente (CA Paris, 21e ch. B, 10 mars 1995, Molho c/ SA Agri International).

Évaluation de la performance du salarié

Le juge évalue également la performance du salarié pour apprécier si ses mauvais résultats proviennent d'une insuffisance professionnelle ou d'une faute. Là encore, il va se poser plusieurs questions.

L'employeur a-t-il laissé au salarié un temps suffisant pour atteindre ses objectifs ?

L'employeur doit laisser au salarié le temps de faire ses preuves et d'obtenir des résultats satisfaisants. Par conséquent, le licenciement est injustifié lorsque le délai d'appréciation des résultats du salarié n'est pas raisonnable.

C'est le cas lorsqu'il s'écoule moins de trois mois entre la fin de la période d'essai et le licenciement (Cass. soc., 14 janv. 1998, no 95-43.882). De même, lorsque le salarié n'exerce ses fonctions que depuis deux mois, l'employeur ne peut lui reprocher de ne pas avoir obtenu de contrats ou de clients nouveaux (Cass. soc., 29 mai 1979, no 78-40.624). Il a toutefois été jugé qu'une période de cinq mois et demi était suffisante pour évaluer la performance d'un commercial lorsque celle-ci se caractérisait par une absence totale de résultat (Cass. soc., 4 déc. 1985, no 83-42.271).
L'employeur doit également respecter la période d'évaluation des résultats prévue par le contrat de travail. Ainsi, lorsque le contrat fixe un objectif de chiffre d'affaires pour l'année civile, l'employeur ne peut pas licencier le salarié pour insuffisance de résultat au mois d'août en faisant une projection des résultats jusqu'au mois de décembre, alors qu'une période de quatre mois reste à courir (Cass. soc., 29 sept. 2009, no 07-45.722).

En cas de contentieux, le juge doit apprécier la performance du salarié dans sa globalité. Il a notamment été jugé qu'une cour d'appel ne pouvait pas apprécier les mauvais résultats d'un salarié à la date du licenciement et conclure à l'insuffisance professionnelle, sans tenir compte des événements postérieurs au licenciement. Ici, le salarié licencié avait travaillé sur plusieurs projets importants ayant abouti après son licenciement (Cass. soc., 30 juin 2004 no 02-43.420).

Quel est l'écart entre les objectifs fixés et les résultats atteints ?

Le juge doit apprécier l'écart entre les objectifs fixés et les objectifs atteints par le salarié pour évaluer l'ampleur de l'insuffisance de résultat et juger si le licenciement est justifié ou non. Le licenciement est justifié lorsque les résultats du salarié sont sensiblement inférieurs aux objectifs fixés dans son contrat de travail (Cass. soc., 31 mars 1994, no 91-41.678).
C'est le cas lorsque :

les résultats du salarié ne lui ont pas permis de percevoir la moindre commission sur chiffre d'affaires (Cass. soc., 26 sept. 2002, no 00-45.636) ;
les résultats sont inférieurs de 43 % aux objectifs fixés (Cass. soc., 26 oct. 1999, no 97-43.613) ;
le salarié a réalisé moins de la moitié de l'objectif minimum fixé par son contrat (Cass. soc., 24 janv. 2001, no 98-46.428).

À l'inverse, le licenciement est injustifié lorsque le chiffre d'affaires réalisé par le salarié est très proche de l'objectif fixé (Cass. soc., 26 janv. 1994, no 92-40.325).

Quelles sont les performances des autres salariés ?

Pour évaluer la performance du salarié licencié, le juge peut également comparer ses résultats avec ceux de ses collègues, de son prédécesseur ou de son successeur. Ainsi, le licenciement est justifié lorsque le salarié licencié réalisait des ventes bien inférieures à la moyenne des ventes réalisées par les autres vendeurs du même site (Cass. soc., 31 oct. 2007, no 06-44.165). De même, est justifié le licenciement du salarié qui n'a pas atteint les objectifs fixés alors que son prédécesseur et son successeur y sont parvenus (Cass. soc., 18 juill. 2001, no 99-43.339). En revanche, si un commercial a démarché plus de clients que ses collègues qui n'ont pas non plus atteint l'objectif fixé, son licenciement pour objectif non atteint est abusif (Cass. soc., 29 janv. 2008, no 06-44.224).
Cependant, le juge ne peut pas se fonder uniquement sur l'analyse des performances des autres salariés de l'entreprise ou du service pour justifier l'insuffisance professionnelle du salarié licencié (Cass. soc., 5 févr. 2003, no 00-46.169).

L'employeur est-il responsable des mauvais résultats du salarié ?

Pour que le licenciement soit valable, encore faut-il que l'employeur ne soit pas responsable des mauvais résultats du salarié, notamment s'il ne lui fournit pas les moyens de réaliser les objectifs qui lui ont été fixés.
Tel est le cas lorsque l'employeur :

prend une mauvaise décision de gestion engendrant des déficits (Cass. soc., 24 févr. 1988, no 85-43.654) ;
mène une mauvaise politique commerciale (Cass. soc., 2 oct. 1991, no 88-44.005) ;
effectue les livraisons des clients avec du retard (Cass. soc., 23 févr. 2000, no 98-40.482) ;
est responsable de la perte d'un marché (Cass. soc., 24 mai 2000, no 98-41.614).

Y a-t-il insuffisance professionnelle ou faute du salarié ?

Le fait de ne pas avoir atteint les objectifs fixés ne constitue pas, en soi, une cause de licenciement. L'insuffisance de résultat ne caractérise une cause de licenciement que si elle est due à la carence du salarié (Cass. soc., 14 mai 2003, no 01-42.648). Cette carence peut provenir d'une insuffisance professionnelle ou d'une faute. Par exemple, le salarié fait preuve d'insuffisance professionnelle lorsqu'il néglige la prospection de clientèle (Cass. soc., 26 oct. 1999, no 97-43.613) ou n'effectue pas assez de visites de clients (Cass. soc., 17 mai 2000, no 98-42.384).

La Cour de cassation a rappelé que l'insuffisance professionnelle ne constituait pas une faute, « sauf mauvaise volonté du salarié » (Cass. soc., 17 févr. 2004, no 01-45.643).

En pratique, il est très rare que la faute grave soit caractérisée en cas de non-atteinte des objectifs. La faute a été reconnue lorsque le salarié avait commis des actes d'indiscipline (Cass. soc., 12 mars 1986, no 83-41.908) ou lorsqu'il avait refusé d'exécuter des tâches prévues par son contrat de travail (Cass. soc., 16 oct. 1996, no 94-45.593).

Rappelons, enfin, que lorsque l'employeur se place sur le terrain de l'insuffisance professionnelle, le licenciement ne peut être considéré comme disciplinaire. En effet, l'insuffisance professionnelle ne constitue pas une faute. Autrement dit, l'employeur doit invoquer soit l'insuffisance professionnelle, soit la faute du salarié. S'il invoque les deux, le licenciement est nécessairement privé de cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 17 fév. 2004, no 01-44.543).
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Merci beaucoup expert56 ! :)

Merci pour toutes ces informations, en gros, je ne peux rien faire parce que j'étais en période d'essai, mais ailleurs, mon employeur aurait été en tord. Cela me rassure.


Donc si je résume pour se prémunir de ce genre de soucis durant la période d'essai, il faut passer un maximum de choses par écrit ?
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expert56 Messages postés 568 Date d'inscription jeudi 8 mars 2012 Statut Membre Dernière intervention 16 octobre 2013 171
3 juin 2012 à 14:02
De toute façon l'écrit est toujours la seule preuve fondamentalement recevable. Donc bien évidemment pour tout le monde c'est la meilleure sécurité.
Mais un employeur bien informé ne justifie jamais pourquoi il rompt sa période d'essai. Cela serait donner une opportunité au salarié de lancer une procédure.
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expert56 Messages postés 568 Date d'inscription jeudi 8 mars 2012 Statut Membre Dernière intervention 16 octobre 2013 171
31 mai 2012 à 14:21
Bonjour,

La période d'essai est la période durant laquelle l'employeur et le salarié peut rompre le contrat sans préavis, sans motifs ni indemnités.
Donc votre patron n'as pas a justifié son licenciement et cela est même déconseillé.

Si vous arrivez à avoir une preuve écrite que le motif de la rupture de la période d'essai est une insuffisance pro, sans précision des objectifs, alors il y a peut-être un moyen de défense.

Ce qui me turlupine est cette durée de période d'essai. De combien de temps était-elle dans votre contrat? étais-ce un renouvellement de période d'essai?
Dans le cas d'un renouvellement, avez-vous été prévenu de cette prolongation de période d'essai?

Cordialement

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