Retour sur liquidation suite à gain aux jeux.

redigan Messages postés 19 Date d'inscription samedi 8 septembre 2012 Statut Membre Dernière intervention 16 octobre 2012 - 8 sept. 2012 à 18:03
redigan Messages postés 19 Date d'inscription samedi 8 septembre 2012 Statut Membre Dernière intervention 16 octobre 2012 - 14 oct. 2012 à 12:06
Bon à toutes et tous,

Afin de pouvoir poser ma question, voici l'exposé des faits qui concernent mon épouse par rapport à son ex-mari. Nous les nommerons madame X et monsieur Y dans cet exposé.

En 2008, monsieur Y et madame X sont mariés depuis 1990 sous le régime de la communauté réduite aux acquêts., Ils sont co-propriétaires d'un pavillon dont le prêt immobilier est en cours de remboursement, sont co-contractants de plusieurs prêts personnels également en cours de remboursement, et ont trois enfants mineurs. Madame X est secrétaire médicale dans le public, monsieur Y est demandeur d'emploi et touche des allocations de chômage.

Vers fin 2008, madame X effectue une demande de divorce à l'encontre de monsieur Y qui l'accepte. Une ordonnance de non conciliation (ONC) est prononcée en janvier 2009 avec séparation de domicile. Le compte bancaire commun est conservé entre les deux futurs ex-époux, sur lequel sont versées, entre autres fonds, les allocations de chômage de monsieur Y. Parallèlement, madame X ouvre son compte personnel sur lequel son salaire est versé, mais elle alimente le compte commun car sur celui-ci sont encore prélevées les mensualités des prêts. On suppose que monsieur Y a ouvert son propre compte personnel de son côté.

Vers mai 2009, soit quatre mois environ après le départ de l'ONC, monsieur Y joue au nouveau jeu de grattage de la Française des Jeux : le CASH. Il achète un ticket à 5 euros, le gratte, et gagne la somme de (n) euros (une TRES grosse somme). Il ne fait bien-sûr état de ce gain à personne.

Le projet de liquidation entre les deux époux est établi chez notaire en novembre 2009. Ce projet établit entre autres choses que madame X prendra en charge le paiement des mensualités de tous les prêts ainsi que le versement d'une soulte à monsieur Y pour l'acquisition du pavillon.

Le divorce est prononcé début septembre 2010. Le juge homologue le projet de liquidation, ainsi que le versement par monsieur Y d'une pension de 60 euros pour chacun des deux enfants encore mineurs à cette date. Ce « faible » montant s'explique par le fait que monsieur Y ne bénéficie plus alors que de ses allocations de chômage.

Jusqu'à mi-aout 2012, madame X s'est toujours demandée comment monsieur Y pouvait se permettre de mener un train de vie très confortable (qu'elle savait par ses enfants) alors que celui-ci ne travaillait toujours pas et se montrait toujours aussi peu généreux avec ses enfants, comme si ses revenus étaient très limités. La vérité tombe alors, divulguée par l'un des frères de monsieur Y, qui avait tenté de faire chanter celui-ci contre la somme de (n) euros que monsieur Y a refusé de verser. Parallèlement, monsieur Y en parle même à d'autres personnes, y compris ses enfants. Il ne conteste donc pas l'acquisition de cette somme. Pourquoi en a-t-il fait état maintenant ? Nous pensons qu'il se croyait à l'abri de toute poursuite vis-à-vis d'un délai de prescription quelconque. Ce qui n'est pas le cas.

En effet, fort justement à mon sens, madame X est en droit de demander la moitié de cette somme de (n) euros, ou tout du moins de ce qui peut rester aujourd'hui (elle n'en demande en fait que le nécessaire, (n) euros, qu'elle a proposé à monsieur Y par le biais d'une transaction amiable contre tout abandon de poursuites et tout renoncement de ré-évaluation de la pension alimentaire qu'elle est aujourd'hui en droit de demander au vu des faits nouveaux, et que monsieur Y a refusé).

Mon argument repose sur les éléments suivants :

D'une part il est possible de considérer ce fait comme un cas d'oubli ou d'omission de déclaration d'un bien indivis à la liquidation (article 892 du Code civil), dont la reprise n'est pas limitée dans le temps à contrario de l'action en complément de part dont le délai de prescription est de deux ans à partir de la date du partage.

D'autre part, et si certes l'article 262-1 du Code civil prévoit que dans le cas d'un divorce pour acceptation du principe de la rupture du mariage, tout bien acquis au cours de l'ONC devient un bien propre et non commun, les époux demeurent cependant solidaires des comptes communs et des fonds empruntés sur ces comptes.

Toute la donne change à ce niveau : monsieur Y a acheté un ticket à gratter. Mais les fonds (5 euros) ayant servi à acheter ce ticket peuvent provenir aussi bien des propres deniers de monsieur Y que des deniers communs détenus sur le compte commun. Là-dessus, il faut savoir que d'une part, monsieur Y n'avait pas d'autres revenus que ceux déposés sur le compte commun, d'autre part il n'a établi aucun document devant notaire pouvant permettre de confirmer que les fonds ayant permis d'acheter ce ticket provenaient de ses deniers personnels.

Dès lors, l'article 1402 du Code civil, qui pose la présomption d'acquêt sauf à prouver le contraire, s'applique et prévaut.

Je crois que la jurisprudence est maigre pour un tel sujet, mais peut-être suffisante pour permettre de nous donner raison. Toutefois, devant le vide juridique pour ce cas de figure, les dispositions de l'article 1402 prévalent.

Mais un principe semble être clair, décrit par un office notarial (Baillargues, à Vandargues dans l'Hérault) sur internet, à la question : « Doit-on partager un gros lot gagné au loto avec son conjoint ? » :

«Nous présumons que les époux concernés sont mariés sous le régime de la communauté de biens.

Si un gain, au moins pour partie, est lié à la compétence particulière d'un époux (jeu mettant en oeuvre ses qualités physiques ou intellectuelles), il est dû, dans cette mesure, à l'"industrie personnelle" de l'intéressé et à ce titre, a vocation à bénéficier à la communauté.

En présence de gains résultant de la participation à un jeu de pur hasard, comme le loto, exclusif, donc, de toute notion d'industrie personnelle d'un époux, on considère qu'il y a lieu de distinguer en fonction de l'origine des deniers ayant servi à l'acquisition du titre de participation. Si ces deniers proviennent de la communauté, le gain lui-même bénéficie à cette dernière ; si, inversement, leur caractère propre est établi, le gain obtenu est également propre.

Bien entendu il faut exclure l'existence d'une fraude, comme celle de faire reconnaître un don manuel par un proche de sa famille du montant du ticket de loto. »

En conséquence, et riche de tous les éléments fournis, ma question, simple, est la suivante : mon épouse a-t-elle toutes les chances de pouvoir se lancer dans une procédure qu'elle saura être gagnante pour elle, ou bien vaut-il mieux en rester là ?

En vous remerciant par avance.

PS : je préfère demeurer discret sur le montant gagné à ce jeu.

7 réponses

redigan Messages postés 19 Date d'inscription samedi 8 septembre 2012 Statut Membre Dernière intervention 16 octobre 2012 5
8 sept. 2012 à 19:26
Merci pour votre réponse. Ma femme (et non ex : "exposé des faits qui concernent mon épouse par rapport à son ex-mari") n'a pas encore lancé de procédure. Il n'est pas question de revenir sur l'ONC en elle-même, mais sur un bien obtenu à partir du financement de quelque chose ayant permis d'obtenir ce bien, en l'occurrence un ticket à gratter financé avec des fonds communs. Là est toute la différence. Et qui dit fonds communs dit biens acquis communs (article 1402), ce même durant une ONC, dans le cadre d'une communauté réduite aux acquêts et un divorce pour acceptation du principe de la rupture du mariage.

Je vous l'accorde, c'est un cas complexe et rare. Mais je retiens votre mention de tentative d'escroquerie ainsi que le délai de prescription indiqué, ce même si par rapport ladite tentative, l'article 262-1 peut poser souci ... D'où ce que j'ai indiqué précédemment, qui semble être la brêche la plus sûre pour lancer une procédure.
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sophiag Messages postés 38398 Date d'inscription samedi 20 décembre 2008 Statut Contributeur Dernière intervention 10 mars 2020 9 145
Modifié par sophiag le 8/09/2012 à 19:40
Ah tres bien, je n'avais pas bien comprise ....
donc, en effet, il va falloir étudier la meilleure manière d'engager cette action car la tentative d'escroquerie est prescrite sur trois ans (je vais vous mettre les textes) et la, si elle a des preuves, c'est parfait
En revanche, pour l'action que vous souhaitez mener, il faut être sur de son coup, donc, voir un avocat car il serait préférable qu'un professionnel étudie vos chances d'aboutir ou pas et dans quel action se lancer.
Cordialement
https://www.legavox.fr/blog/maitre-haddad-sabine/jurisprudence-penale-delit-escroquerie-jugement-1578.htm
Jurisprudence
Crim 26 mars 1998 (GP 1998 II Chr.crim. 121 )

« Constitue une tentative d'escroquerie le fait pour une partie de présenter sciemment en justice un document mensonger destiné à tromper la religion du juge et susceptible, si la machination n'est pas déjouée, de faire rendre une décision de nature à préjudicier aux intérêts de l'adversaire. » voir aussi Crim. 14 mars 1972 (GP 1972 II 738)

Des déclarations mensongères, même répétitives, ne suffiront pas pour constituer le délit d'escroquerie lorsqu'elles ne sont pas accompagnées d'un fait extérieur ou d'un agissement quelconque destiné à y faire ajouter foi.

Les éléments extérieurs ( manoeuvres, fausse qualité, faux document, mise en scène...) devront être provoqués de mauvaise foi, par l'intervention et l'utilisation de l'appareil judiciaire dans l'obtention d'une décision en vue de la spoliation de l'adversaire.

Crim 20 avril 2005, n° de pourvoi: 04-84828

Crim 7 avril 1992 a condamné un époux qui, sans présenter de faux documents, avait produit des pièces qui donnaient une image inexacte de sa situation réelle ...

Les circonstances de fait seront appréciées souverainement. Il faudra démontrer la fausseté des documents allégués par exemple.

N'oublions pas les dispositions de l'article 272 du code civil qui prévoit que

« Dans le cadre de la fixation d'une prestation compensatoire, par le juge ou par les parties, ou à l'occasion d'une demande de révision, les parties fournissent au juge une déclaration certifiant sur l'honneur l'exactitude de leurs ressources, revenus, patrimoine et conditions de vie.... »

La production d'une fausse attestation obligatoire aux débats sera un élément à considérer, si elle a emporté ou faussé la conviction du juge.uelle a le plus de chance d'aboutir

______________________________________________________


L'article 313-1 du Code pénal dispose
:

« L'escroquerie est le fait, soit par l'usage d'un faux nom ou d'une fausse qualité, soit par l'abus d'une qualité vraie, soit par l'emploi de manoeuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou morale et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d'un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge. L'escroquerie est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 375000 euros d'amende. »

La peine et l'amende pourront être majorées dans certaines circonstances agravantes visées par l'article L 313-2 du Code pénal (ex bande organisée...) , étant rappelé que la tentative est punie des même peines que l'action aboutie.

Le principe posé,il faut rappeler que: Si toute action en justice est un droit, des limites sont posés à la fois dans l'abus de l'action, mais aussi dans sa fraude. Ainsi

- - L'abus de droit "d'ester en Justice", fautif peut être sanctionné par une amende civile et des dommages et intérêt contre le demandeur; (Il s'agit ici d'une action judiciaire, intentée de mauvaise foi, sachant qu'elle est vouée à l'échec ou pour nuire à l'adversaire. De la même façon en cas de plainte avec constitution de partie civile, d'appel ou de pourvoi en cassation jugés dilatoires ou abusifs)

- - La duperie et la tromperie des juges provoquée par des manoeuvres déterminantes constitueront le délit pénal d'escroquerie au jugement.

Toute production d'une pièce fausse, destinée à obtenir une décision qui portera atteinte au patrimoine d'autrui, ou l'omission dans une déclaration pourront être prises en compte.

"L'escroquerie au jugement" tient dans le fait de tromper la religion du juge dans le but d'obtenir un titre avec lequel le demandeur pourra porter atteinte à la fortune de la personne condamnée, de vouloir obtenir en fraude des droits d'autrui une décision de Justice

La Cour de cassation a précisé les contours de la notion d'élément matériel.

A partir du moment où une action en justice n'est que l'exercice d'un droit, il ne suffira pas pour que ce délit soit constitué, que le plaideur formule des allégations mensongères, mêmes répétitives. Il faudra qu'il les accompagne d'éléments extérieurs.

I- La définition de l'élément matériel affinée par les Tribunaux

A) Rappel de principe: l'usage de manoeuvres
Les tribunaux considèrent que le jugement est un titre exécutoire qui crée obligation ou décharge.

Pour la jurisprudence , le fait de tromper sciemment un juge pour en obtenir une décision favorable à ses prétentions, soit par la production de faux documents, soit à l'aide de faux témoignages.

Ce principe a été posé il y a plus d'un siècle.


Crim 23 janvier 1919, (Bull. n° 21) « Le délit de tentative d'escroquerie au jugement est caractérisé par des manoeuvres frauduleuses visant à tromper le juge dans l'exercice de sa fonction... »
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