Gestion des dépôts de garantie en colocation à bail multiple

Résolu
Aabeor Messages postés 3 Date d'inscription mercredi 2 août 2023 Statut Membre Dernière intervention 29 mars 2024 - 2 août 2023 à 19:52
_lael_ Messages postés 4426 Date d'inscription dimanche 2 février 2020 Statut Membre Dernière intervention 28 avril 2024 - 3 août 2023 à 18:01

Bonjour,

Ma question est : comment gérer les dépôts de garantie dans le cas d'une colocation à baux multiples, de façon à couvrir les dégradations causées aux parties communes ?

Dans une colocation avec baux multiples, au départ d'un des locataires il y a restitution du dépôt de garantie du locataire partant, avec retenues éventuelles si des dégradations imputables à ce locataire ont été commis.

Si les dégâts concernent la partie privative du locataire (sa propre chambre) la situation est simple car elle ne concerne que le locataire en question. Mais comment gérer les éventuels dégâts commis dans les parties communes lors du départ d'un des locataires ?

Les responsabilités peuvent alors être plus difficiles à attribuer entre les différents locataires. Et combien-même ces responsabilités auraient été établies, comment gérer les retenues sur les dépôts de garantie du locataire partant, et des locataires restants ?

Pour simplifier voici un exemple : il y a 2 colocataires, A qui est partant et B qui reste, et le salon (partie commune) doit-être repeint suite à dégradations. Le cout de rénovation est évalué à 1000 euros. Imaginons que la responsabilité est imputable à 75% au locataire A et à 25% au locataire B. Faut-il alors déduire 750 euros lors de la restitution du dépôt de garantie du locataire A qui est partant, et prévoir que 250 euros seront ultérieurement retenus lors de la restitution du dépôt de garantie au locataire B au moment de son départ ?

Ou faut-il mieux s'affranchir de la notion hasardeuse de répartitions des responsabilités, et peut-on à la place définir un principe de solidarité collective de tous les colocataires sur toutes les dégradations en parties communes, de sorte que dans l'exemple ci-dessus avec 2 colocataires et 1000 euros de dégâts en parties communes la retenue serait de 500 euros au départ du locataire A et également provisionnée à 500 euros pour le locataire B, indépendamment de qui aurait causé quoi dans les faits ?

Qu'il s'agisse de la 1ère ou de la 2ème de ces modalités de gestion des dépôts de garantie, est-il légalement possible de les formuler dans les bails de colocation individuels ?

Merci d'avance pour vos éclairages !

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3 réponses

_lael_ Messages postés 4426 Date d'inscription dimanche 2 février 2020 Statut Membre Dernière intervention 28 avril 2024 2 013
Modifié le 3 août 2023 à 15:17

"Ma question est : comment gérer les dépôts de garantie dans le cas d'une colocation à baux multiples, de façon à couvrir les dégradations causées aux parties communes ?"

Légalement, en cas de baux séparés et comme indiqué dans le message #1, la loi semble vouloir écarter la possibilité de prévoir une disposition contractuelle engageant par défaut la responsabilité du locataire en cas de dégradation dans les parties communes dans les articles 4e et 7c de la loi de 1989 :

4e) : "Est réputée non écrite toute clause : e) Qui prévoit la responsabilité collective des locataires en cas de dégradation d'un élément commun de la chose louée ;"

7c) : "c) De répondre des dégradations et pertes qui surviennent pendant la durée du contrat dans les locaux dont il a la jouissance exclusive, à moins qu'il ne prouve qu'elles ont eu lieu par cas de force majeure, par la faute du bailleur ou par le fait d'un tiers qu'il n'a pas introduit dans le logement ;"

La formulation de l'article 4e est d'ailleurs discutable car elle parle de "responsabilité collective" et non pas de "responsabilité individuelle".

Idem la formulation de l'article 7c) est également discutable car elle admet la responsabilité du location pour les parties dont il a la jouissance exclusive mais n’écarte pas pour autant explicitement la possibilité d'engager la responsabilité du locataire pour les parties collectives à jouissance partagée.



Quoiqu'il en soit, ce n'est pas incompatible avec l'application de l'article 1353 du Code Civil :

"Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver."

Ce qui veut dire qu'il reste possible d'engager la responsabilité du locataire à condition de la prouver :
- Le locataire admet sa responsabilité par écrit daté et signé
- Témoignage d'autres locataires ou toutes autres preuves

Par contre ça ne relève plus de la responsabilité contractuelle mais de la responsabilité de droit commun, donc si on fait une application stricte de la loi et en particulier de l'article 22 de la loi de 1989 relative au dépôt de garantie, il n'est théoriquement pas possible d'utiliser le dépôt de garantie pour compenser un préjudice extra-contractuel et seul un juge pourrait prononcer une "compensation de créance" à ce titre.



Au point important, les articles précédents (4e et 7c) ne s'appliquent qu'aux "dégradations", ce qui exclut de fait l'entretien et les menues réparations prévues à l'article 7d) de la loi de 1989 :

"Le locataire est obligé : d) De prendre à sa charge l'entretien courant du logement, des équipements mentionnés au contrat et les menues réparations ainsi que l'ensemble des réparations locatives définies par décret en Conseil d'Etat, sauf si elles sont occasionnées par vétusté, malfaçon, vice de construction, cas fortuit ou force majeure."

Il n'y a pas de notion de "jouissance privative" comme pour le 7c) ni de nullité comme au 4e).

De la même façon, il est également indiqué "l'entretien courant du logement et des équipements mentionnés au contrat", un contrat de colocation désigne l'ensemble du logement en définissant des parties communes et des parties privatives, ainsi que les équipements (électroménager, meubles, etc...) et toutes ces parties sont donc sous la responsabilité du locataire pour leur entretien et menues réparations en accord avec cet article.

Une clause prévoyant que le colocataire quittant le logement doit payer pour le ménage non effectué dans les parties collectives ou les menues réparations prévues au Décret n°87-712 du 26 août 1987, n'apparait donc à priori pas illicite.

Par contre il faut la coupler à une clause d’aggravation des charges en précisant que "l'entretien et les menues réparations" ne sont pas inclues au forfait de charges, ou les charges tout court, et sont de la responsabilité du locataire.




Après, même en présence d'une clause illicite engageant "par défaut" la responsabilité du locataire pour des dégradations dans les parties communes, seul un juge pour déclarer la clause illicite.

C'est donc le locataire qui doit saisir le tribunal pour contester la retenue sur son DG.

Et à priori le juge ne peut pas relever ces illégalités d'office, même si elles sont d'ordre public, il faut vraiment qu'elles soient soulevées par le locataire lui-même.

Seul les contrats dépendant du Code de Consommation permettent au juge de relever d'office des dispositions légales, et un bail d'habitation ne relève pas de ce code, même si c'est au final le Juge des contentieux de la protection qui gère à la fois les affaires relevant du Code de la Consommation de celles relevant des baux d'habitation.



Bon après je ne suis pas juriste, c'est basé sur mon expérience et les jugements que j'ai pu avoir à ce sujet.

Sachant que j'ai également eu des jugements assez contradictoires des JCP qui ont jugées ce genre d'affaires.

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djivi38 Messages postés 51333 Date d'inscription dimanche 12 avril 2015 Statut Membre Dernière intervention 28 avril 2024 15 131
3 août 2023 à 17:18

Alors, d'après vous, les manques d'entretien et/ou de menues réparations ne pourraient donc pas être à l'origine de "dégradations", pour lesquelles le coût des réparations serait légalement retenu sur le DG du locataire... (à condition des lesdites dégradations soient bien entendu notifiées sur l'EDLS signé des parties prenantes) ¿ ¿ ^^

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_lael_ Messages postés 4426 Date d'inscription dimanche 2 février 2020 Statut Membre Dernière intervention 28 avril 2024 2 013 > djivi38 Messages postés 51333 Date d'inscription dimanche 12 avril 2015 Statut Membre Dernière intervention 28 avril 2024
3 août 2023 à 18:01

Je ne vois pas trop où vous voulez en venir.

Ce n'est pas moi qui fais la distinction, c'est l'article 7.

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djivi38 Messages postés 51333 Date d'inscription dimanche 12 avril 2015 Statut Membre Dernière intervention 28 avril 2024 15 131
2 août 2023 à 20:20

bonjour,

"Mais comment gérer les éventuels dégâts commis dans les parties communes lors du départ d'un des locataires ?"

Les colocataires avec baux individuels ne sont pas solidaires entre eux : vous ne pouvez pas faire de retenue sur le DG d'un colocataire pour une dégradation dans une partie commune... à moins que le colocataire qui a dégradé quelque chose dans une partie commune ne se dénonce -> dans ce cas, la retenue pourra être faite sur son propre DG.

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Et pour répondre à votre dernière question, hélas c'est  "Non" puisqu'il ne peut pas y avoir de solidarité entre des baux individuels : art 4-e loi 6/7/1989 : https://www.legifrance.gouv.fr/loda/article_lc/LEGIARTI000028806566/

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Peut-être pourrez-vous déduire ces frais de vos revenus fonciers... ?

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cdt.


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Aabeor Messages postés 3 Date d'inscription mercredi 2 août 2023 Statut Membre Dernière intervention 29 mars 2024
3 août 2023 à 10:35

Bonjour, et merci pour la réponse très claire

J'imagine qu'il doit être possible, à minima, d'inclure explicitement dans le bail de location que le DG couvre aussi les dégâts potentiels en partie commune, et de ne mettre cette clause en application que de façon individuelle et dans les cas de figure où un locataire sortant reconnaît sa responsabilité dans le dégât en question ?

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djivi38 Messages postés 51333 Date d'inscription dimanche 12 avril 2015 Statut Membre Dernière intervention 28 avril 2024 15 131
3 août 2023 à 13:41

"....d'inclure explicitement dans le bail de location que le DG couvre aussi les dégâts potentiels en partie commune" : NON.

Je suppose que vous pourriez (conditionnel) insérer dans chaque contrat individuel de colocation que SI des dégradations sont constatées (lors d'un EDLS) dans les parties communes, le montant de leur réparation serait à la seule charge "du" colocataire responsable : mais s'il ne se dénonce pas de lui-même, ce serait à vous de "prouver" qu'un tel est "le" responsable.... ce qui est impossible puisque vous ne vivez pas avec vos locataires et donc ne pouvez pas voir de vos propres yeux qui est responsable...

Attention : toute clause contraire à la loi est réputée non écrite.

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